


Vous avez récemment été nommé Directeur général du Forum INCYBER Canada. Quelle est votre vision pour cet événement ?
Mon objectif, ainsi que celui de toute l’équipe d’INCYBER, est de faire de cet événement la conférence incontournable en matière de cybersécurité et de numérique au Canada. Notre réussite repose sur notre capacité à réunir les décideurs politiques et les experts opérationnels et techniques afin de favoriser une meilleure sensibilisation, une meilleure compréhension et une unité d’action face aux défis de la cybersécurité. Les relations entre le public et le privé sont essentielles, tout comme la coopération entre l’industrie et le milieu universitaire, car la cybersécurité est étroitement liée à la sécurité économique et à la sécurité nationale du Canada. De plus, ces relations et opportunités ne concernent pas seulement les gouvernements fédéral et provinciaux/territoriaux, mais s’étendent également à l’international. Notre véritable succès réside dans le fait de connecter les parties prenantes au niveau national tout en établissant des liens avec des alliés et partenaires à l’échelle mondiale. Cette année, de nombreuses délégations de pays européens viendront au Canada pour cet événement. Les opportunités sont immenses.
Votre carrière militaire, notamment dans les opérations cyber au sein des Forces armées canadiennes, vous a placé au cœur des enjeux de la sécurité numérique. Quelles leçons tirez-vous de cette expérience pour ce nouveau rôle ?
La principale leçon, selon moi, est l’importance de bâtir la confiance en face à face. Les courriels et les appels ont leur utilité, mais pour créer des relations durables dans le domaine cyber ou numérique, il faut se rencontrer en personne, afin de pouvoir aborder des sujets sensibles de manière concrète. C’est encore plus crucial à l’international : se rendre dans un pays allié et prendre le temps de rencontrer les gens dans leurs quartiers généraux ou leurs unités montre un véritable engagement envers la mission. Il faut établir un lien de confiance au niveau personnel. Cela vaut aussi pour le secteur privé : les affaires se lancent et se développent bien mieux en personne.
Le Canada fait face à des défis cyber spécifiques — une vaste géographie, des infrastructures critiques dispersées, et des liens étroits avec les États-Unis. À votre avis, quels sont les enjeux de cybersécurité les plus urgents dans le contexte canadien ?
Je pense qu’il y a de nombreux défis, mais je propose que l’on se concentre d’abord sur deux : l’investissement dans la technologie et dans les personnes. Si nous voulons garder une longueur d’avance sur les acteurs malveillants, nous devons être prêts à investir rapidement et à grande échelle, tout en prenant des risques calculés dans certains domaines. Je sais que cela peut être difficile pour certains gouvernements et entreprises, mais ces risques mesurés nous permettront de garder l’avantage face à un adversaire sans contraintes. Cela implique de rationaliser les politiques, les cadres juridiques, la gouvernance et la supervision – que l’adversaire, lui, n’a pas à respecter.
Le deuxième point est l’investissement dans les ressources humaines. Le Canada possède une main-d’œuvre numérique très bien formée et compétente. Il faut simplement commencer plus tôt, accélérer leur développement, et faire preuve de créativité pour en former beaucoup plus. La demande est forte dans le gouvernement, l’industrie privée et le milieu académique. Nous devons investir massivement dans le développement de la main-d’œuvre numérique de demain.
Pourquoi un événement comme le Forum INCYBER est-il essentiel aujourd’hui ?
Nous devons continuer à étendre nos réseaux de contacts et de collaboration au sein du vaste écosystème cyber canadien, et également le connecter à l’échelle mondiale. Cet événement offre une occasion précieuse d’échanger, de partager les leçons apprises et de discuter des bonnes pratiques en matière de politiques et d’approches face aux défis que nous avons tous en commun, tout en découvrant les nouveaux outils et capacités qui arrivent sur le marché ou qui sont en phase d’innovation.
Avec des menaces qui évoluent rapidement — de l’intelligence artificielle à la cybercriminalité en passant par les tensions géopolitiques — quelles sont, selon vous, les problématiques émergentes à anticiper de toute urgence ?
L’adoption de l’intelligence artificielle et de l’informatique quantique s’impose aujourd’hui comme un enjeu majeur — et ces domaines sont en effet critiques. Mais au-delà des technologies elles-mêmes, le véritable défi réside dans notre capacité à agir avec la vitesse et l’envergure nécessaires pour protéger nos actifs numériques. Cela devient d’autant plus complexe dans un contexte mondial instable, où les États doivent arbitrer entre différentes priorités budgétaires, et où les entreprises évoluent avec prudence.
C’est pourquoi il est impératif de redoubler d’efforts et d’investir massivement, tant dans les technologies que dans les talents. Car ce sont des personnes compétentes, créatives et engagées qui, comme toujours, trouveront les solutions aux défis à venir.
En tant que nouveau Directeur Général du Forum INCYBER Canada, comment voyez-vous l’évolution de l’événement dans les années à venir ?
Je pense que nous avons une réelle opportunité de croître et de renforcer encore davantage nos liens. Nous souhaitons étendre notre présence au Canada et multiplier les collaborations avec les provinces, les territoires, les Premières Nations et les municipalités dans les années à venir. Il est essentiel de connecter ces différents niveaux de gouvernement et les partenaires industriels à notre événement déjà solide en Europe — et bientôt au Japon. Les relations que nous construisons font de ce Forum un véritable événement de portée mondiale, et nous avons clairement l’intention de poursuivre cette expansion à l’avenir.
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